...Dans la nuit du 12 au 13 [de ce mois], le plan a été mis à exécution et mené comme suit. Vers minuit, 1800 soldats ont pris place dans des barques. Vers 2h30, les barques étaient déjà en direction de la rive. Ont suivi les navires canonniers et ceux contenant les munitions et l'approvisionnement. Je me suis embarqué à mon tour sur le Lowestoff. Les bateaux Sea Horse, Squirrel, Hunter et deux autres barques avec des troupes étaient à mes côtés. Le Sutherland est demeuré dernière nous afin de monter la garder sur les mouvements ennemis, notamment les batteries mobiles et les petites embarcations. Nos navires devaient se diriger le plus près possible de la rive afin de débarquer les troupes alors que les navires canonniers seraient à leurs côtés. Grâce à la bonne fortune, toutes les opérations se sont déroulées comme prévu. Le capitaine Chads était en charge des navires. Il s'est assuré, non sans mal, que le silence soit maintenu et que toutes les troupes soient débarquées avant le lever du jour pour provoquer l'effet de surprise. La force du courant sur le fleuve était un obstacle important. Au lever du jour les soldats de même que les navires étaient en place.
Le général, suivi des troupes débarqués lors de la première vague, ont alors entrepris de traverser le précipice et de gravir la colline et ce sans aucune opposition de l'ennemi. Les gardiens pris par surprise ont été faits prisonniers par le capitaine.
Toutes les barques étaient très occupées à transporter le gros des troupes des navires de guerre vers la rive avec 1200 hommes à leur bord. M. Wolfe avait ordonné que les soldats de Pointe Lévy se rendent sur la rive sud, face à l'Anse-au-Foulon, afin d'être transportés de l'autre côté et d'aider à monter les pièces d'artillerie en haut de la falaise. De cette façon, le général disposait de l'ensemble de son armée sur la rive ennemie à moins de deux miles de la ville et ce, sans que le quartier-général ennemi en soit informé. Ainsi M. Montcalm croyait toujours que notre objectif était de débarquer en aval de Québec, à Beauport, et que nos mouvements de troupes n'étaient qu'une dissuasion. Son hypothèse a été confirmée par les mouvements dissuasifs de M. Saunders qui avait pris soin de mettre à l'eau pendant la nuit des bouées en direction de Beauport afin de laisser croire que nos navires de guerre iraient débarquer les troupes sur ces rives, appuyés par leur puissance de feu.
Montcalm, bien que surpris, s'est empressé de réagir à la situation. Il ordonna à ses troupes de Montmorency et Beauport de marcher vers les hauteurs de la citadelle tout près de l'endroit où nous avons capturé des soldats. Montcalm n'en croyait pas ses yeux. Il n'arrivait pas à concevoir que nous avions débarqué si rapidement une force militaire aussi importante. La géographie irrégulière du terrain ne lui permettait pas non plus de juger nos forces car plusieurs étaient dissimulées. Il n'a eu autre choix que d'attaquer bien qu'il n'avait pas encore ses canons et toutes ses troupes en marche vers Québec.
Entre 8 heures et 10 heures, Montcalm était occupé à assembler son armée de près de 9000 hommes parmi lesquels se trouvaient cinq bataillons de soldats réguliers. Nous avions de notre côté une armée de 4600 soldats réguliers.
Vers 10 heures, Montcalm a placé ses troupes en ordre de bataille et nous a attaqués sur les Plaines d'Abraham. La disposition et l'avance des troupes étaient excellentes. Wolfe était bien préparé. Il s'est même réjoui de l'ardeur des troupes ennemies. Elles ont tiré deux volées avant que Wolfe retourne le tir. C'est alors que la bataille a commencé et a duré tout au plus un quart d'heure. Le régiment [britannique] Lascelle a été le premier à engager le combat avec les baïonnettes fixées aux mousquets. Au même moment, l'ennemi a été surpris par une attaque de flanc de nos Highlanders ce qui a mis leurs troupes et toute leur armée en déroute. Les soldats se sont réfugiés dans la ville. Le reste de la bataille a été une poursuite et un carnage par les membres des Highlanders et de leur sabre. Le Gén. Wolfe est tombé au combat très tôt. Il est demeuré vivant suffisamment longtemps pour apprendre que ses troupes avaient gagné la bataille. Ses derniers mots furent : « Puisque j'ai vaincu, je meurs en paix ».
Le brigadier Monckton, le Colonel Carleton, les majors Barry et Spittal et bien d'autres courageux officiers ont été gravement blessés. Cinq cents hommes ont été tués ou blessés au combat. Du côté ennemi, les troupes ont perdu les quatre officiers les plus importants : leur Général en chef Montcalm, deux brigadiers et le colonel le plus haut gradé dans la hiérarchie. En plus de plusieurs officiers gradés, 1100 soldats sont également morts lors de la bataille ou furent blessés ...
A bord du Lowestoff, près de Foulon, Québec, le 18 sept. 1759.